Travail avec les classes

VELIZI

Lors d'une intervention dans l'école Ferdinand Buisson de Vélizi, nous avons abordé de nombreux thèmes avec les classes de CM2. Ces échanges furent passionnants grâce au travail préliminaire des enseignantes (Mmmes Ceccaldi et Delmotte) que je remercie vivement à nouveau. Les élèves de Mme Delmotte ont mis à profit leur séance un peu plus longue pour écrire des textes que je vous livre ci-dessous. Bravo à tous pour votre imagination et la qualité de vos productions ! Belle route à tous ! (PS : je n'oublie pas les dédicaces !)


Alexandra et Jenyfer.pdf (9072)
Etienne, Baptiste, Léo, Arthur et Marco.pdf (9348)
Julie, Cassie, Marie.pdf (10022)
Louise, Ludmina, Sofia et Elise.pdf (31497)
Mohamad et Wistan.pdf (9379)
Victor Kil Jor.pdf (9094)

 

 

Voici un lien vers les site "les pieds sur terre" qui vous propose un très bel outil pour découvrir les peuples autochtones, leur histoire, les enjeux de leur survie et les moyens d'agir. Des fiches élèves, des fiches enseignants et de très beaux posters sont à télécharger sur ce site : www.lespiedssurterre.fr/enseignants.htm

 

 

Suite à une correspondance aussi sympathique que constructive avec la classe de CM2 de Magali, à l'école Voltaire de Denain, les élèves m'ont demandé un chapitre alternatif, suite à l'épisode de l'incendie de brousse. Ils souhaitaient que ce soit le jeune Rianto qui vienne en aide à Karuna, blessé. Voilà c'est chose faite : merci pour cette bonne idée, qui m'a replongé dans l'histoire: Karuna et Lemayian m'ont manqué !

Je vous livre ce document en pdf et dans la page.

 

Chap 4 alternatif.pdf (25 kB)

 

P75 : leur silhouette meurtrie.

Rianto reprit connaissance. Karuna le déposa doucement au sol après avoir écarté les cendres. Le jeune garçon regarda la plaine qui fumait de toutes parts, tout lui revint en mémoire. Il lança un regard plein d'admiration et de gratitude à Karuna. Après quelques instants, tous deux reprirent leur marche. Les pieds de Karuna étaient si douloureux qu'il manquait de chuter à chaque pas, Rianto ne savait que faire pour l'aider et il souffrait de voir la chair à vif se couvrir de cendre mélée de sang.

Beaucoup d'animaux avaient fui dans les collines pendant l'incendie. Maintenant, ils regagnaient la plaine avec prudence. Rianto vit une meute de chacals dorés se regrouper au loin. Ils n'avaient rien à craindre de ces petits prédateurs. De plus, la fumée masquait les moranes et brouillait l'odorat des animaux.

Karuna ne levait même plus la tête maintenant. Toute sa raison luttait pour maîtriser la douleur. Soudain, il marcha sur une branche encore incandescente cachée sous la cendre. Il ne put, malgré son entraînement, retenir un cri et chuta lourdement. Rianto tenta de le relever mais les forces de Karuna le quittaient. La souffrance annihilait son énergie. Désemparé, le jeune berger se força à réfléchir. Aller à l'enkang ? C'était loin, il lui faudrait laisser Karuna sans défense. Le soigner ? Avec quoi ? Il ne connaissait pas les onguents. Le porter ? Impensable, il faisait deux fois son poids.

Karuna se redressa, fit deux pas puis s'effondra. Rianto retint des larmes de honte. Il ne pouvait même pas aider celui qui lui avait sauvé la vie. Serrant les poings, il prit de grandes respirations pour se calmer.

- « Un morane ne baisserait pas les bras, se dit-il. Un morane chercherait la solution dans son cœur et dans celui de la Terre-mère. »

Rianto regarda autour de lui. Un sourire éclaira son visage couvert de cendre. Il ramassa les lames d'eremet de Karuna et se dirigea rapidement vers un acacia noirci. Il choisit soigneusement deux branches, les cassa puis les tailla en fourche à leur sommet. Il présenta ces deux béquilles au morane. Celui-ci leva les yeux sur Rianto, chassa la douleur de son regard et fit un clin d'oeil au garçon. Il se releva lentement en ajustant les branches sous ses bras. Rianto déchira un pan de son pagne. Il entreprit d'entourer de tissu les pieds du morane. Le corps de Karuna se tendit mais il ne broncha pas. Le guerrier planta les béquilles dans la cendre, puis posa un pied. Son corps se tendit, puis se relacha. Karuna sourit. Il recommença en changeant de pied et se retourna : « en route, petit laïbon ! ». Rianto éclata de rire.

Les deux Maasaï avancèrent vers les collines. La route serait longue, au rythme des petits pas de Karuna. Mais ils avaent repris confiance, ils finiraient bien par trouver de l'aide en se rapprochant de l'enkang.

Soudain, un jappement derrière eux attira leur attention. Un chacal les suivait en trottinant. Karuna, d'instinct, en chercha un second car ils chassaient par paires. Il le trouva, devant eux, presque caché par la fumée. Les cris des deux compagnons avaient dû les attirer. Plus intrigué qu'alarmé, le guerrier se demanda pourquoi les chacals s'intéressaient à eux, alors que les petits prédateurs leur arrivaient à peine à mi-cuisse. Ils reprirent leur route lentement, Rianto en tête, dégageant le passage pour son ami blessé. Les chacals trottinaient toujours à quelques pas.

Brusquement, l'un deux mordit le mollet de Karuna. Celui-ci s'effondra dans un cri de surprise, Rianto se retourna, le chacal s'enfuyait déjà. La morsure était légère, les deux Maasaï se regardérent avec perplexité. Pourquoi ces animaux se comportaient aussi étrangement ? Les chacals ne s'attaquaient jamais aux hommes, beaucoup plus grands et forts qu'eux. Rianto devina alors, dans la poussière de la plaine, de nouvelles petites silhouettes. La meute se rassemblait. Qu'est-ce qui leur prenait ? Karuna comprit que sa blessure et sa démarche avaient fait de lui une proie facile.

Ils tentèrent d'accélérer. Les deux Maasaï connaissaient la tactique de harcèlement des chacals, qui attaquaient leurs proies de tous les côtés. Karuna ne pouvait tenir debout sans ces béquilles, Rianto était le seul à pouvoir les défendre, mais comment ? Il ne pourrait frapper partout à la fois !

Tendus, ils reprirent leur marche. Karuna ne pouvait saisir son olalem. Il se sentait vulnérable, impuissant, il détesta cela. Rianto desserra soudain la lanière de ses calebasses, puis demanda la longue ceinture de Karuna. Tout en avançant, le petit berger assemblait quelque chose que Karuna ne voyait pas. La meute les encerclait lentement. L'attaque était inévitable. Deux chacals bondirent soudain vers Karuna. Celui-ci tenta de frapper avec une béquille mais il ne parvint pas à garder son équilibre et chuta. Rianto l'avait prévu, il se précipita vers le morane :

- « Couche-toi, Karuna ! »

Levant les bras au ciel, il déroula en un éclair les lanières de cuir auxquelles il avait attaché les lames de l'eremet . Puis il fit de grands moulinets dans les airs alors que les chacals attaquaient de toutes parts maintenant. Tournant sur lui-même, Rianto déclencha un tourbillon de fer. Les lames sifflaient, rasant le sol nu de plus en plus vite. Très vite, les premiers chacals jappèrent de douleur, pattes brisées ou tailladées. Rianto continuait de pivoter sur place. Quatre puis cinq chacals s'écroulèrent. Le reste de la meute marqua brusquement un temps d'arrêt puis s'enfuit en hurlant. L'attaque n'avait duré qu'une poignée de secondes.

Rianto, pris de vertige, posa un genou au sol en laissant retomber les lames. Il se redressa et poussa un cri de victoire suraïgu vers les fauves. Il chassait de ses poumons la rage et la peur. Ces yeux rencontrèrent enfin ceux de Karuna. Le morane regardait l'enfant avec stupéfaction et respect. Oublié le garçon étourdi qui avait négligé le crocodile, oubliée la honte devant ses camarades. Rianto frissonna de joie. Karuna ne regardait plus un petit berger :

    • « Un jour viendra, Rianto, il est proche et je l'attends avec envie. Un jour viendra où tu porteras toi-aussi l'eremet . Ce jour-là, les lions baisseront les yeux. »

 

Rianto sentit sa poitrine se gonfler de fierté, il aida le morane à se relever. Karuna le serra dans ses bras longtemps. Puis ils reprirent leur route, laissant derrière eux une trace dans la cendre grise. Un long sillage qui disait à la plaine : « regarde-nous, Terre-mère, nous sommes tes fils et nous serons vivants à jamais ».

Il était tard quand ils atteignirent l'enkang. Le soir commançait à voler au monde ses couleurs. Tous se précipitèrent vers les deux compagnons. Karuna expliqua ce qui s'était passé...................

 

suite …...... p78 ...